La loi Aillagon a instauré en France le régime fiscal du mécénat d’entreprises en 2003, après une histoire d’incitations moins franches. Ce dispositif d’incitation fiscale des entreprises à donner à l’intérêt général vient compléter celles réservées aux particuliers. Parmi toutes les mesures incitatives en France, le soutien public au mécénat des entreprises a un poids significatif. On le mesure par la dépense fiscale qui y est consacrée. En 2017, ce « manque à gagner » d’impôt s’élève à 900 millions d’euros. Le mécénat des entreprises est donc un ressort important du financement de l’intérêt général.
Le régime fiscal du mécénat d’entreprises français est l’un des plus généreux d’Europe, voire du monde. D’abord, le montant de l’abattement d’impôt, 60% du don, est très important. Ensuite, il n’existe pas de montant maximum en valeur absolue à consacrer au mécénat pour les entreprises. C’est le chiffre d’affaire de l’entreprise qui détermine en effet ce dernier. En outre, les modalités de don sont nombreuses. Une société peut ainsi contribuer en numéraire, mais aussi en nature, en compétences, en services, et en personnel. Enfin, il est possible pour les entreprises de bénéficier de contreparties de la part du récipiendaire des dons.
Suite à la publication d’une évaluation du mécénat d’entreprises par la Cour des Comptes, les lois de finances 2019 et 2020 ont commencé à en mettre en œuvre les recommandations.
Le mécénat d'entreprises en France : un régime fiscal très généreux
La loi Aillagon modifie en 2003 l’article 238 Bis du code général des impôts. Ce dernier stipule que les dons des entreprises ouvrent droit à une réduction d’impôt de 60% du montant du versement. La réduction d’impôt s’applique à des dons dont le montant ne peut excéder 0,5% du chiffre d’affaire de l’entreprise. Ainsi, par exemple, une entreprise qui réalise un chiffre d’affaire de 10 millions d’euros peut consacrer 50 000 euros au mécénat. Elle bénéficie alors d’une réduction d’impôt de 30 000 euros. Le montant de la réduction d’impôt d’une part, le maximum proportionnel au chiffre d’affaire d’autre part, font du régime fiscal du mécénat d’entreprises le dispositif le plus incitatif d’Europe, voire du monde. Ces chiffres ne sont pas pour autant les seuls avantages.
Le mécénat permet aux entreprises de contribuer à l’intérêt général tout en bénéficiant d’avantages fiscaux et de contreparties. Pour les sociétés qui veulent démontrer leurs valeurs et engager leurs collaborateurs, le mécénat présente de nombreux avantages. Ce guide s’adresse aux entreprises qui souhaitent se lancer dans le mécénat de manière stratégique, ou améliorer plus encore leur impact social.
Le panel des organismes pouvant bénéficier du mécénat d'entreprises est très large
L’article 238 Bis du code général des impôts liste les organismes auxquels les dons des entreprises ouvrent le droit aux réductions d’impôts. Les organismes d’intérêt général arrivent en premier lieu. Le libellé de l’alinéa apporte deux précisions importantes pour les entreprises. D’une part, l’organisme peut porter le nom de l’entreprise. La loi fait ici implicitement références aux fondations d’entreprises. D’autre part, elle stipule que le nom de l’entreprise peut être associé aux opérations menées par les organismes. Cette précision n’est pas anodine, elle ouvre la porte aux contreparties (voir infra).
Le deuxième alinéa mentionne les fondations et associations reconnues d’utilité publique. Les alinéas suivants, enfin, listent les autres organismes éligibles au mécénat d’entreprises. Ainsi des établissements d’enseignement supérieur, des organismes de recherche et des opérateurs du champ culturel. Pour plus de précisions sur les organismes bénéficiaires, on peut se reporter à la section 1 de la notice BOI-BIC-RICI-20-30-10-20-20180103 du Bulletin Officiel des Finances Publiques.
Les dons des entreprises mécènes peuvent être réalisés en nature
La section 2 de la notice BOI-BIC-RICI-20-30-10-20-20180103 du BOFIP détaille les conditions relatives aux versements des entreprises. Sa première partie précise la forme et la valorisation des dons. Les deux suivantes traitent des justificatifs et du traitement comptable et extra-comptable des dons. La dernière partie explicite les différences entre contreparties et parrainage (voir infra). On se contentera ici de mentionner que le régime fiscal du mécénat d’entreprise s’applique à la fois aux dons en numéraires et en nature. La notion de dons en nature recouvre les biens mobiliers et immobiliers, et les prestations de services.
Citons plusieurs exemples pour démontrer l’ampleur des possibilités qui s’offre aux entreprises qui souhaitent recourir au régime fiscal du mécénat :
- La mise à disposition de personnels salariés par l’entreprise dans un organisme bénéficiaire est une forme de prestation. C’est le mécénat de compétences.
- Une entreprise peut offrir une prestation de service ou de conseil au titre du mécénat d’entreprise.
- Les dons de denrées alimentaires, y compris celles prévues par la loi de 2016 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire, sont éligibles à la réduction d’impôts.
- Le même esprit s’applique aux dons de meubles ou de véhicules d’occasion.
- Les dons immobiliers entrent aussi dans le régime fiscal du mécénat d’entreprise.
La réduction d'impôt au titre du mécénat d'entreprises peut être reportée sur 5 exercices
Le législateur a prévu une dernière mesure incitative dans le régime fiscal du mécénat d’entreprises. Il s’agit de l’étalement de la réduction d’impôt dans le temps. En autorisant le report de la réduction d’impôt sur cinq exercices comptables, la loi rassure les sociétés. Si d’aventure l’entreprise ne réalisait pas un bénéfice lui permettant d’exploiter pleinement la réduction d’impôt, elle peut en bénéficier sur les exercices suivant. Cette mesure vise aussi à encourager les dons importants. Une entreprise peut en effet, en exploitant cette possibilité ouverte par la loi, faire un don très significatif en une fois et profiter de l’abattement d’impôt sur les cinq années suivantes.
Le régime fiscal du mécénat d'entreprise tolère les contreparties
Dans l’esprit de la loi, par définition, le don éligible aux réductions d’impôt est sans contreparties. Il existe cependant des tolérances. Ainsi, pour les particuliers, une contrepartie de 65 euros maximum est admise. Dans le cas des dons des entreprises des lettres ministérielles, pré-existantes à la loi de 2003, autorisent les contreparties. La notion clé est ici celle de la disproportion. Une contrepartie trop élevée par rapport au don serait en effet assimilée à une prestation de services de la part de l’organisme bénéficiaire. La jurisprudence fiscale retient le chiffre de 25% pour marquer la disproportion entre le don et les contreparties.
Les dernières évolutions législatives encadrent et contrôle la fiscalité du mécénat d'entreprises
Sans reprendre toutes les conclusions du rapport de la Cour des Comptes, le gouvernement a apporté de nouvelles mesures d’encadrement et de contrôle au régime fiscal du mécénat d’entreprise. La loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République instaure des obligations de déclaration et de présentation des reçus fiscaux. Les loi de finances 2019 et 2020 viennent elles corriger le régime fiscal du mécénat d’entreprises. Elles créent trois mesures importantes. D’abord, elles instaurent une franchise pour développer le mécénat des TPE et PME. Ensuite, elle créé une obligation de transparence pour les sociétés qui consacrent plus de 10 000 euros par an au mécénat. Enfin, pour les très grandes entreprises, les dons au delà de 2 millions d’euros ne bénéficient plus d’un abattement que de 40%.
Une franchise pour les TPE et PME : le mécénat pour tous jusqu'à 20 000 euros
L’article 238 Bis du CGI permet aux entreprises de déduire 60% du montant de leurs dons, dans la limite de 0,5% de leur chiffre d’affaire. Pour les petites entreprises, cette règle était très limitatrice. La loi de finances 2019 instaure donc une franchise à l’attention des TPE et PME. Elle s’élève à 10 000 Euros. La loi de finances 2020 double la mise en définissant le montant de la franchise à 20 000 euros. En d’autres termes, toutes les entreprises, quel que soit leur CA, peuvent dorénavant consacrer 20 000 euros par an au mécénat. Et elle bénéficient dans ce cas d’un abattement d’impôt de 14 000 euros. Au delà d’un chiffre d’affaire de 2 millions d’euros, c’est la règle des 5 pour 1000 qui prévaut. Cette mesure est de nature à contribuer fortement à la démocratisation du régime fiscal du mécénat d’entreprises.
Plus de contrôle sur l'utilisation des dons au delà de 10 000 euros
La loi de finances 2019 vise aussi à répondre aux critiques de la Cour des Comptes. Son rapport dénonce en effet l’opacité de l’utilisation des dons par les grands groupes. Ces derniers ont créé des fondations d’entreprises qui bénéficient de leur mécénat et qu’ils contrôlent. La mobilisation de ce train de véhicules philanthropiques interroge donc le caractère d’intérêt général de leur démarche. Le correctif apporté à l’article 238 Bis du Code des impôts vise ainsi à instaurer plus de transparence. Pour renforcer le contrôle du régime fiscal du mécénat d’entreprises, les sociétés dont les dons sont supérieurs à 10 000 Euros devront maintenant produire une déclaration à l’administration. Ce document doit mentionner « le montant et la date de ces dons, l’identité des bénéficiaires ainsi que la valeur des biens et services reçus, directement ou indirectement, en contreparties ». L’adoption de la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République instaure une plus grande traçabilité fiscale du mécénat d’entreprise et son contrôle par l’Etat.
Un abattement fiscal réduit à 40% au-delà de 2 millions d'euros
Avec l’adoption de la loi de finances 2020, deux taux de réduction d’impôt apparaissent. Pour la fraction des versements inférieurs à 2 millions d’euros, c’est le taux de 60% qui s’applique. Au delà de 2 millions d’euros, le taux de réduction d’impôt est de 40% du montant du versement, toujours dans la limite des 0,5% du chiffre d’affaires de l’entreprise. Néanmoins, pour les versements aux organismes d’aide aux personnes en difficulté, le taux de 60% est maintenu.
En conclusion
Le régime fiscal du mécénat d’entreprises est extrêmement généreux en France. Et il n’est plus seulement réservé aux grandes entreprises. Pour qui sait l’exploiter pleinement, il peut être vecteur de croissance pour l’entreprise mécène. En additionnant la réduction d’impôt (60%) aux contreparties (25%), le coût réel pour l’entreprise est de 15% du montant du don. Ce qui n’est pas cher payer pour améliorer l’engagement au travail des collaborateurs, ou pour développer son image d’entreprise socialement responsable, tout en participant au financement de l’intérêt général.
Le mécénat permet aux entreprises de contribuer à l’intérêt général tout en bénéficiant d’avantages fiscaux et de contreparties. Pour les sociétés qui veulent démontrer leurs valeurs et engager leurs collaborateurs, le mécénat présente de nombreux avantages. Ce guide s’adresse aux entreprises qui souhaitent se lancer dans le mécénat de manière stratégique, ou améliorer plus encore leur impact social.