La France a un système d’incitations fiscales des particuliers à donner aux associations et fondations particulièrement généreux. Son cadre juridique est néanmoins complexe car chaque incitation ne privilégie que certains organismes. Or en droit social et fiscal français les statuts des organismes sont nombreux. Ainsi, par exemple, pour contourner les controverses sur la définition du concept, le législateur donne aux organismes d’intérêt général une définition avant tout fiscale. Néanmoins, tous les organismes d’intérêt général ne bénéficient pas des mêmes avantages fiscaux, leur activité est en effet à cet égard déterminante. Ce raisonnement s’applique aussi à la grande capacité juridique qu’offre la reconnaissance d’utilité publique.
Ce dossier traite des réductions d’impôt sur le revenu et sur la fortune immobilière, des droits de mutation des legs et donations, et du mécénat d’entreprises. Sont aussi abordées les notions d’organisme d’intérêt général et reconnus d’utilité publique et les procédures de rescrits à la disposition des associations et fondations.
Les incitations fiscales des particuliers à donner
Cet article s’adresse d’abord aux particuliers donateurs philanthropes pour leur indiquer les incitations fiscales à donner existantes, et les associations et fondations qui peuvent bénéficier de leur générosité. En effet miroir, il est aussi l’attention des associations et fondations qui souhaitent se renseigner sur leur capacité juridique à collecter des fonds privés. Cet article traite les incitations fiscales des particuliers à donner suivantes.
- La réduction d’impôt sur le revenu.
- La réduction de l’impôt sur la fortune immobilière.
- Les taux des droits de mutation appliqués aux legs et donations.
Ces trois incitations fiscales des particuliers à donner ne s’adressent cependant pas à tous. La réduction de l’impôt sur le revenu, d’abord, est la plus commune et bénéficie à un panel large d’organismes. L’incitation à donner au titre de l’impôt sur la fortune immobilière, ensuite, ne concerne par définition que les contribuables assujettis. Et le législateur oriente vers un nombre restreint d’organismes ces dons spécifiques. Le droit des successions, enfin, prévoit que les particuliers peuvent faire des legs et donations à certains organismes. Mais l’exonération totale des droits de mutation des libéralités est un privilège rare, réservé à un panel resserré d’organismes.
1) La réduction de l'impôt sur le revenu (IR)
L’article 200 du Code général des impôts prévoit une incitation fiscale à donner dans le cadre de l’impôt sur le revenu. Il fait l’objet d’un commentaire du Bulletin Officiel des Finances Publiques détaillé.
Les organismes bénéficiaires : un panel vaste
Le panel des organismes autorisés à délivrer des reçus fiscaux que le donateur particulier peut présenter pour voir réduit son impôt sur le revenu est vaste. Ce sont les
- organismes d’intérêt général un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement naturel, à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises. Depuis 2024, les organismes concourant à l’égalité femmes-hommes s’ajoutent à la liste.
- fondations et les associations reconnues d’utilité publique.
- établissements d’enseignement supérieur ou artistique.
- organismes publics ou privés dont l’activité est la présentation de spectacles.
- organismes agréés ayant pour objet de participer à la création d’entreprises.
- fondations et associations agréés et la Fondation du patrimoine qui financent des travaux sur un monument historique privé.
- fondations d’entreprises (avec certaines limites).
- associations cultuelles, de bienfaisance et les établissements publics des cultes reconnus d’Alsace-Moselle.
- fonds de dotation et associations d’intérêt général qui œuvrent au pluralisme de la presse.
- associations de financement politique.
La nature des dons : un éventail large
Dans le même esprit d’ouverture de l’incitation fiscale à donner au plus rand nombre, les modalités de don sont larges. Il s’agit des
- dons manuels : en numéraire, en chèque, par virement ou carte bleue.
- cotisations des membres des organismes ci-dessus, le cas échéant.
- renonciations au remboursement des frais des bénévoles.
- dons en nature. Le champ de ces dons est restreint à la remise d’œuvres d’art ou d’objets de collection présentant un intérêt artistique ou historique.
- abandons de produits. Il s’agit par exemple de la non perception de loyer dans le cas de prêts de locaux à titre gratuit, de l’abandon de droits d’auteur au profit d’un organisme, ou de produits de placements solidaires ou caritatifs.
L'incitation fiscale : deux taux et un report pluriannuel possible
Le taux de la réduction d’impôt sur le revenu est de 66% du montant du don. La réduction s’applique sur les dons dont le montant ne peut excéder 20 % du revenu imposable. Un donateur peut néanmoins faire don d’un montant plus important que le plafond de 20%. L’avantage fiscal de la réduction d’impôt courre en effet sur 5 années. Ainsi, la fraction des dons qui n’a pas bénéficié de la réduction l’année de leur versement peut être reportée aux années suivantes.
L’incitation fiscale à donner dans le cadre de l’impôt sur le revenu prévoit néanmoins un second taux. Depuis la loi Coluche de 1989, il est spécifique aux dons effectués au profit des organismes sans but lucratif qui offrent des prestations aux personnes en difficulté. Depuis 2022 les dons aux organismes d’aide aux victimes de violence domestique y sont aussi éligible. Et le législateur crée en 2024 une nouvelle catégorie d’imposition temporaire pour les dons réalisés via la Fondation du patrimoine au profit de la conservation et de la restauration du patrimoine immobilier religieux des petites communes. Le taux de la réduction d’impôt sur le revenu pour les dons à ces organismes passe alors à 75% du montant du don. Un plafond altère cependant cet avantage fiscal important. Alors que ce plafond était déterminé par décret, depuis le crise du Covid, il relève d’une disposition législative. La loi de finances 2024 le fixe à 1000 euros jusqu’en 2026.
2) La réduction de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI)
L’impôt sur la fortune immobilière remplace l’impôt de solidarité sur la fortune. Ce changement de politique fiscale, en divisant par deux le nombre de contribuables assujettis, a engendré une baisse des dons importantes pour les associations et fondations. Le mécanisme d’incitation fiscale de l’ISF est cependant maintenu pour l’IFI.
L'incitation fiscale cible quelques organismes bénéficiaires
- Les fondations reconnues d’utilité publique
- les acteurs de l’insertion par l’activité économique et de l’accompagnement à la création d’entreprise
- l’agence nationale de recherche et d’autres structures de l’enseignement et de la recherche.
Dons d'argent et dons de titres seulement
La loi prévoit deux formes de dons qui ouvrent droit à la réduction de l’IFI. Les dons d’argent, d’une part, et les dons de titres d’autre part. Toutes les modalités de versement sont admises pour les dons d’argent. C’est la date du reçu fiscal délivré par l’organisme donataire qui fait foi. Pour les dons de titres, le don se matérialise par un acte authentique ou sous seing privé. La jurisprudence fiscale autorise aussi le simple don manuel des titres. Pour donner une valeur aux titres, le BOFIP suggère de calculer la moyenne du cours en bourse le jour de la transmission des titres. Il admet cependant qu’il est possible de retenir le dernier cours connu du titre, c’est-à-dire son cours de clôture de la veille du transfert des titres.
Une réduction de l'impôt de 50 000 euros par an maximum
La réduction d’impôt est égale à 75 % du montant des dons effectués par le contribuable. L’article 978 du CGI prévoit que la réduction d’impôt ne peut excéder 50 000 euros par redevable et par année d’imposition. Pour les propriétaires immobiliers assujettis à l’impôt sur la fortune immobilière, il est donc possible de réduire le montant de son impôt de 50 000 euros. Il faut néanmoins pour cela que le montant d’impôt à payer soit supérieur à cette somme. En effet, la réduction d’impôt sur l’IFI ne peut dépasser le montant de l’impôt car, à la différence de la réduction d’impôt sur le revenu, il n’est pas possible de reporter un excédent d’une année l’autre.
3) Les taux préférentiels des droits de mutation pour les legs et donations
L’article 910 du Code Civil prévoit la possibilité pour les particuliers d’accorder des libéralités à certains organismes, publics et privés. Nous ne traitons ici cependant que des personnes morales privées : les associations et fondations. En effet, malgré les lois, ordonnances, décrets et circulaires destinés à simplifier le droit des libéralités, la capacité des associations et fondations à recevoir legs et donations reste un canevas complexe. Seuls quelques organismes bénéficient de taux préférentiels sur les droits de mutation lorsqu’ils perçoivent des legs et donations.
Les précautions à prendre pour réaliser un legs ou une donation
Le particulier philanthrope qui voudrait faire bénéficier un organisme de sa générosité par le biais d’un legs ou d’une donation doit prendre quelques précautions. D’une part, il ne peut faire don de ses biens que dans la quotité disponible. Ses héritiers, le cas échéant, sont en effet protégés par la réserve héréditaire. D’autre part, la donation doit faire l’objet, sous peine de nullité, d’un acte authentique devant notaire. Les legs font eux l’objet d’un acte authentique ou d’un testament olographe. La loi exige que l’organisme bénéficiaire déclare la donation au Préfet du département ou que le notaire déclare le legs.
3 types d'organismes bénéficiaires, pour 3 taux différents
Le cas général, d’abord, ouvre le droit aux associations d’intérêt général de recevoir legs et donations. Celles-ci doivent néanmoins être déclarées depuis au moins trois ans et revêtir les caractéristiques qui les autorisent à émettre des reçus fiscaux. C’est-à-dire être à caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, etc… Dans ce cas, les droits de mutation s’élèvent à 60% du montant de la donation ou du legs.
Les associations reconnues d’utilité publiques et fondations reconnues d’utilité publiques, ensuite, ont la grande capacité juridique. Elles disposent de ce fait du droit de recevoir les legs et les donations. Le taux d’imposition est pour elles de 35 % pour une donation ou un legs dont le montant s’élève jusqu’à 24 430 €. Au delà de ce montant, le taux passe à 45%.
Le législateur prévoit enfin que certains organismes bénéficient de l’exonération de droits sur les legs et donations. L’Article 795 du Code des impôts donne la liste des organismes :
- Les associations reconnues d’utilité publique (cf supra) dont les ressources sont affectées à des œuvres d’assistance, à la défense de l’environnement, à la protection des animaux.
- Les fonds de dotation ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, etc. et ceux dont la gestion est désintéressée et qui reversent les revenus tirés des dons à d’autres organismes à but non lucratif.
- Les associations cultuelles et congrégations.
- Les établissements publics ou d’utilité publique, dont les ressources sont exclusivement affectées à des œuvres scientifiques, culturelles ou artistiques à caractère désintéressé.
- Les fondations universitaires, les fondations partenariales et les établissements d’enseignement supérieur reconnus d’utilité publique.
Pour aller plus loin sur les incitations fiscales à donner
Les donateurs particuliers qui sont à la tête d’entreprises peuvent aussi recourir au régime fiscal du mécénat d’entreprises. L’incitation fiscale des entreprises à donner est en effet l’une des plus généreuses au monde. Et elle est dorénavant ouverte aux TPE et PME. Les grandes fortunes peuvent aussi réfléchir à la création de leur propre véhicule philanthropique.
Les associations doivent elles vérifier auprès du fisc et de l’administration leur éligibilité à recevoir ces différentes incitations fiscales à donner. Pour ce faire, la procédure de rescrit est le canal privilégié de dialogue avec le fisc. Le rescrit est un document opposable, délivré par l’administration. En cas de doute du donateur, lui présenter un rescrit est un gage de crédibilité. Le rescrit fiscal mécénat statut sur la capacité de l’association ou de la fondation à émettre des reçus fiscaux pour les dons au titre de telle ou telle incitation fiscale à donner. Les associations et fondations qui s’interrogent sur leur droit à accepter des legs et donations doivent elles s’adresser au préfet de département. C’est le rescrit administratif.
Grâce à notre dictionnaire, appréhendez les notions d’utilité sociale, d’utilité publique et d’intérêt général et les grands principes de l’Économie Sociale et Solidaire. Découvrez la coopération, l’intérêt collectif, la règle « Un homme, une voix » et les concepts d’organisme à but non lucratif et de lucrativité limité. Le Dictionnaire de l’économie sociale et solidaire de SOESS comporte en plus autant d’entrées alphabétiques qu’il y a de types d’acteurs dans le champ de l’ESS. Bref, ce dictionnaire est la porte d’entrée sur le monde riche et complexe de l’Économie Sociale et Solidaire en France.