Mécénat et responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE) : deux notions distinctes mais imbriquées

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  • Dernière modification de la publication :6 mai 2024
  • Publication publiée :11 février 2024
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Le mécénat et la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) sont deux notions souvent confondues. C’est parfois à juste titre, tant elles sont de plus en plus souvent étroitement imbriquées l’une à l’autre. Cet article rappelle dans un premier temps les définitions et le cadre légal de la responsabilité sociétale d’une part, du mécénat d’entreprise d’autre part. Dans un second temps, il décrit les différentes articulations possibles, pour les entreprises, entre les obligations qui leur incombent au titre leurs responsabilités sociétales et la politique qu’elles peuvent développer en termes de mécénat.

Le mécénat et la Responsabilité Sociétale de l'Entreprise, deux notions distinctes

La Responsabilité Sociétale de l’Entreprise présente un caractère obligatoire, légal. Elle est aussi vitale pour l’entreprise, au sens où elle devient un avantage concurrentiel auprès de ses clients « consom’acteurs ». Le mécénat d’entreprise est, quant à lui, une capacité facultative de l’entreprise, quand bien même le régime fiscal est très incitatif. 

La Responsabilité Sociétale de l'Entreprise, une obligation

Depuis 2011, la Commission européenne définit la responsabilité sociétale de l’entreprise comme « la responsabilité des entreprises vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société ». En France, la RSE a un caractère obligatoire. L’article 1833 du Code Civil affirme que « La société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité ». Les grandes entreprises sont même tenues de publier chaque année avec leurs comptes une déclaration de performe extra-financière.

La prise en considération des enjeux sociaux et environnementaux couvre un champ important de mise en œuvre de la responsabilité sociétale d’une entreprise. Par exemple, dans sa gestion  des ressources humaines, une entreprise peut mettre en place des démarches spécifiques contre les discriminations ou visant à améliorer l’articulation des vies personnelle et professionnelle, au titre de sa RSE. Encore par exemple, chercher à réduire sa consommation d’énergie et ses émissions de polluants, ou améliorer la gestion de ses déchets sont des actions à prendre pour une entreprise responsable.

Selon les directives de la norme ISO 26000, l’entreprise, pour être en pleine responsabilité vis-à-vis de la société, doit analyser ses pratique de gouvernance, à l’égard des droits de l’homme, des relations et conditions de travail, de l’environnement, de la loyauté des pratiques (commerciales), des questions relatives aux consommateurs et enfin dans son rapport aux communautés et au développement local. Dans une logique plus extensive encore, on peut considérer que la responsabilité sociétale de l’entreprise s’étend à la mesure de son propre impact social. Dès lors c’est à l’aune de sa contribution aux 17 objectifs du développement durable, par exemple, qu’elle peut définir ses actions de RSE.

Mécénat d'entreprise - le guide - Couverture

Le mécénat permet aux entreprises de contribuer à l’intérêt général tout en bénéficiant d’avantages fiscaux et de contreparties. Pour les sociétés qui veulent démontrer leurs valeurs et engager leurs collaborateurs, le mécénat présente de nombreux avantages. Ce guide s’adresse aux entreprises qui souhaitent se lancer dans le mécénat de manière stratégique, ou améliorer plus encore leur impact social.

Le mécénat, une incitation des entreprises à contribuer à l'intérêt général

Le mécénat d’entreprise consiste à faire un don sans contrepartie, ou du moins, si contreparties en services il y a, avec une disproportion marquée. En tant que régime fiscal, le mécénat d’entreprise permet de défiscaliser 60% du montant des dons dans la limite de 0,5% du chiffre d’affaire. Cette règle est encadrée par un palier d’une part : quelque soit son chiffre d’affaire une entreprise peut donner jusqu’à 20 000 euros. Par un plafond d’autre part : au delà de deux millions d’euros de dons, le taux de réduction d’impôt passe de 60% à 40% (à l’exception des dons à certains organismes où il reste à 60%).

Sur la thématique du lien entre le mécénat et la responsabilité sociétale de l’entreprise, il est nécessaire de préciser les différentes formes que le mécénat peut prendre. En effet, si le don d’argent vient spontanément à l’esprit, d’autres modalités de don sont possibles. Une entreprise peut, d’abord, donner à une association ou une fondation du temps de travail de ses salariés, c’est le mécénat de compétences. L’entreprise peut ensuite contribuer à l’intérêt général en donnant des biens et des services. Une société, enfin, peut financer la recherche au travers du mécanisme du mécénat de doctorat. 

Si la ligne de démarcation entre les deux pratiques est parfois épaisse, le mécénat ne saurait être confondu avec le sponsoring (ou parrainage en bon français). C’est l’ADN même du mécénat que de servir en premier lieu l’intérêt général, c’est ce qui justifie l’incitation fiscale. Une entreprise ne bénéficie de la réduction d’impôt sur les sociétés que si elle donne à des organismes d’intérêt général éligibles. On l’aura compris, quand bien même elles y seraient incitées par l’impôt, les entreprises n’ont aucune obligation à s’inscrire dans une démarche de mécénat. 

L'articulation du mécénat et de la responsabilité sociétale de l'entreprise

En France la RSE présente donc un caractère obligatoire pour les grandes entreprises. Et au regard de la loi, toutes les entreprises doivent prendre en considération dans leur gestion les enjeux sociaux et environnementaux de leur activité. Le mécénat d’entreprise, en revanche, est une faculté qui relève du libre de choix de l’entreprise, quand bien même le mécanisme de réduction d’impôt est particulièrement incitatif dès lors qu’il est investi de manière stratégique.

L’articulation entre le mécénat et la responsabilité sociétale de l’entreprise fait néanmoins l’objet de publications qui intéresseront les entreprises stratèges. Citons d’une part L’entreprise engagée : nouvelles frontières de la RSE et du mécénat (juin 2018), étude réalisée par l’Observatoire de la philanthropie de la Fondation de France, en collaboration avec l’association Admical et le Comité 21. L’argument qui y est développé consiste à affirmer que le mécénat et la RSE ont pour point de convergence de l’intérêt général, et qu’il y a tout lieu de les articuler. Mentionnons d’autre part le rapport de la Cour des comptes sur le mécénat d’entreprise qui s’intitule, sans ambiguïté Le soutien public au mécénat d’entreprises – Un dispositif à mieux encadrer. Dans ce rapport, la Cour s’intéresse aux montages élaborés de certaines entreprises qui subordonnent leur fondation, véhicule juridique de leur mécénat, à leur stratégie de RSE.

Le mécénat, toujours vecteur de la Responsabilité Sociétale de l'Entreprise

Par définition, le mécénat d’entreprise contribue à l’intérêt général. Au delà du don monétaire sans contrepartie, sa forme la plus simple, étudions d’autres modalités de sa mise en œuvre qui s’imbriquent de fait dans la responsabilité sociétale de l’entreprise.

Le mécénat de compétences consiste pour une entreprise à mettre à disposition d’un organisme d’intérêt général du temps de travail de son personnel salarié. Il est ainsi vecteur de sens, en complément du temps de travail dédié à l’entreprise elle-même, pour les salariés. Avec le mécénat de compétences, l’entreprise fait d’une pierre deux coups. Elle contribue à l’intérêt général d’une part, et elle met en œuvre une politique de ressources humaines originale. C’est tout l’argumentaire que développe une plateforme comme Vendredi pour proposer ses services aux entreprises. 

Le don en nature entre aussi dans la définition du mécénat d’entreprise, en ce qu’il est éligible à la déduction fiscale. Ainsi une entreprise qui souhaite faire don de ses invendus à une association peut valoriser ce stock en mécénat. Elle bénéficie alors d’une réduction de 60% de la valeur du stock, à son coût de revient, sur son impôt sur les sociétés. Certaines dispositions de cet ordre deviennent même peu à peu obligatoires, et s’intègre pleinement dans une logique environnementale. Ainsi, avec l’adoption en 2015 de la loi Garot, il existe désormais une interdiction de jeter et de détruire des denrées alimentaires, et une obligation de signer une convention de don avec une association de solidarité agréée. De même, l’entrée en vigueur en  2022 des dispositions de la loi AGEC incite fort les entreprises à donner leurs invendus non alimentaires.

La stratégie de responsabilité sociétale de l'entreprise peut intégrer, ou pas, le mécénat

Si le mécénat est toujours vecteur de responsabilité sociétale pour l’entreprise, la question qui se pose aux entreprises stratèges est de savoir comment articuler les deux notions. La politique de mécénat de l’entreprise existe-t-elle par elle même ? Ou bien est-elle subordonnée à la stratégie de RSE de l’entreprise ? Les deux options sont ouvertes. Ce qu’il est important de retenir, c’est qu’une politique de mécénat ne saurait faire office de RSE, au sens où contribuer par des dons à des organismes d’intérêt général n’exonère pas l’entreprise de ses responsabilités. Les entreprises qui se contenteraient de donner à un organisme de défense de l’environnement tout en continuant à polluer ferait en effet du « green washing ». De même une entreprise qui contribuerait à un organisme d’insertion tout en ayant des pratiques discriminatoires en interne ferait du « social washing ».

Par ailleurs, les (grandes) entreprises peuvent se doter d’un véhicule juridique dédié à leur stratégie de mécénat. Elles ont en effet la possibilité de créer une fondation, dont elles maitrisent plus ou moins la gouvernance selon le modèle qu’elles retiennent (contrairement à l’idée reçue, la fondation d’entreprise n’est pas la seule option à leur disposition). La Cour des comptes relève que plusieurs fondations d’entreprises « mentionnent dans leurs statuts qu’elles agissent dans le cadre de la politique de RSE de ces dernières ». Dès lors l’entreprise subordonne sa stratégie de mécénat, conduite via une fondation, à sa RSE. Le rapport de la Cour mentionne ainsi, par exemple, que « les statuts de la Fondation d’entreprise SNCF précisent qu’elle est partie intégrante de la politique de la solidarité de l’entreprise et s’inscrit dans une perspective de responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE) »

En conclusion sur le mécénat et la responsabilité sociétale de l'entreprise

Prendre en compte les enjeux sociaux et environnementaux devient obligatoire pour l’entreprise, qu’il s’agisse de respecter la loi ou d’être compétitif auprès du consommateur sur des critères extra-financiers. Le mécénat est une contribution volontaire de l’entreprise à l’intérêt général. Le mécénat peut participer à la Responsabilité Sociétale de l’Entreprise, mais sans qu’il soit suffisant à la mettre en œuvre entièrement. Le mécénat en effet ne saurait seul exonérer l’entreprise de ses obligations, au risque sinon de tomber dans le « social washing » ou le « green washing ». Les entreprises qui se penchent sur ces sujets doivent principalement arbitrer entre le fait d’intégrer le mécénat à leur politique de RSE, ou à en faire une politique en soit. Quoi qu’il en soit, pour se lancer dans le mécénat, c’est par ici

Le mécénat permet aux entreprises de contribuer à l’intérêt général tout en bénéficiant d’avantages fiscaux et de contreparties. Pour les sociétés qui veulent démontrer leurs valeurs et engager leurs collaborateurs, le mécénat présente de nombreux avantages. Ce guide s’adresse aux entreprises qui souhaitent se lancer dans le mécénat de manière stratégique, ou améliorer plus encore leur impact social.

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