Certaines associations et fondations sont « reconnues d’utilité publique ». La reconnaissance d’utilité publique octroie une grande capacité juridique. Pourquoi ces organismes bénéficient-ils plus de droits que d’autres ? Quelle est la portée juridique de cette grande capacité ? Et quels sont les critères d’attribution de la reconnaissance d’utilité publique ? C’est en répondant à ces questions que nous parvenons à une définition à la reconnaissance d’utilité publique dans cet article.
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Histoire de la définition de la reconnaissance d'utilité publique
Dans le contexte de la Loi de 1901, qui précède celle de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État, le législateur ne donne pas la pleine capacité juridique à toutes les associations. Cette restriction s’applique spécifiquement à la propriété. Le législateur cherche alors à empêcher les congrégations religieuses de reconstituer un patrimoine grâce à la liberté d’association. Dans sa version d’origine, l’article 6 de la loi de 1901 prévoit, d’une part, que les associations ne peuvent posséder que les « immeubles strictement nécessaires à l’accomplissement du but ». Il pose, d’autre part, que les associations n’ont pas le droit de recevoir des libéralités.
Le législateur de 1901 prévoit cependant que certaines associations peuvent posséder la pleine capacité juridique. Il n’invente pas ce droit pour certaines personnes morales de percevoir des libéralités au titre de l’utilité publique. C’est en effet une survivance de mesures antérieures à la Loi de 1901. Mais le législateur donne en contrepartie au Conseil d’État le pouvoir d’en autoriser ou pas la création. Il donne aussi au gouvernement une forme de contrôle sur elles. Les articles 10 et suivants de la loi de 1901 précisent ainsi les contours de la reconnaissance d’utilité publique et les droits et obligations qu’elle confère.
Le contexte des lois de 1901 et de 1905 est tombé en désuétude. Plusieurs dispositions législatives sont donc venues entre temps ouvrir la capacité juridique d’autres types d’associations. La dernière en date est apportée par la loi de 2014 sur l’Économie Sociale et Solidaire. Le milieu associatif se questionne donc sur la raison d’être « reconnue d’utilité publique ». Yannick Blanc, dans une tribune de la Fonda, propose ainsi dès 2009 de donner une nouvelle définition à la reconnaissance d’utilité publique. Le statut survit néanmoins jusqu’à présent.
La "grande capacité" de la reconnaissance d'utilité publique
La définition de la reconnaissance d’utilité publique réside aujourd’hui encore dans la grande capacité juridique des établissements qui la possèdent.
Cette grande capacité s’entend tout d’abord pour les associations et les fondations comme le droit de posséder des biens dont elle ne font pas un usage direct dans l’exercice de leur objet. Les associations et fondations reconnues d’utilité publique peuvent ainsi être propriétaire, par exemple, d’immeubles de rapport.
La grande capacité de la reconnaissance d’utilité publique est aussi pour les établissements qui la possède le droit de recevoir des libéralités, c’est-à-dire des legs et donations. Cette capacité n’est pas pour autant synonyme d’exonération des droits de mutation à titre gratuit. En effet, à moins d’appartenir aux catégories d’organismes mentionnées à l’article 795 du Code des impôts, les organismes reconnus d’utilité publique bénéficient seulement du taux réservé aux frères et sœurs du donateur ou testateur.
Critères d'attribution de la reconnaissance d'utilité publique
L’attribution de la reconnaissance d’utilité publique aux associations et fondations se fait par la publication d’un décret du Conseil d’État, après instruction par le Ministère de l’intérieur. Lors d’une question à l’Assemblée nationale en 2010, le Ministre de l’intérieur a dégagé les critères retenus par la section de l’intérieur du Conseil d’État.
La poursuite d'un but d'intérêt général
En premier lieu, l’établissement sollicitant sa reconnaissance d’utilité publique doit poursuivre un but d’intérêt général. Pour autant, la reconnaissance d’utilité publique ne présuppose pas que l’organisme qui l’obtient est un organisme d’intérêt général. « L’association des lieutenants de louveterie du Loir-et-Cher ne peut être regardée, alors même qu’elle a été reconnue comme étant d’utilité publique, comme un organisme d’intérêt général au sens des dispositions du b du 1 de l’article 200 du code général des impôts » (Cour Administrative d’Appel de Nantes N° 13NT02200).
Les critères de définition de la reconnaissance d’utilité publique diffèrent ensuite selon qu’il s’agit d’associations ou de fondations.
La définition de la reconnaissance d'utilité publique pour les associations
Les associations qui s’engagent dans la procédure de reconnaissance d’utilité publique doivent
- compter au moins deux cents adhérents.
- avoir un rayonnement géographique dépassant le cadre local.
- avoir des ressources propres et présenter un budget en équilibre.
La définition de la reconnaissance d'utilité publique pour les fondations
Les fondations doivent
- apporter des garanties financières suffisantes : l’ordre de grandeur est une dotation initiale d’un million d’euros.
- assurer leur indépendance par rapport aux fondateurs : la composition du conseil d’administration ou de surveillance.
Pour aller plus loin
Par définition, la reconnaissance d’utilité publique offre bien des avantages aux associations et aux fondations. Outre la grande capacité, dans la plupart des cas, elle leur ouvre en effet la possibilité de faire bénéficier leurs donateurs, particuliers ou entreprises, d’avantages fiscaux en émettant un reçu fiscal. Cependant, les organismes reconnus d’utilité publique n’étant pas systématiquement d’intérêt général, ceux d’entre eux qui souhaitent vérifier s’ils ont cette capacité peuvent demander un rescrit fiscal mécénat. De même, la reconnaissance d’utilité publique n’est pas synonyme d’exonération des droits de mutation à titre gratuit.
Ce dossier traite des réductions d’impôt sur le revenu et sur la fortune immobilière, des droits de mutation des legs et donations, et du mécénat d’entreprises. Sont aussi abordées les notions d’organisme d’intérêt général et reconnus d’utilité publique et les procédures de rescrits à la disposition des associations et fondations.