Cet article traite des différents taux appliqués aux droits de mutation des legs et donations des particuliers au profit des associations et fondations. Pour simplifier la lecture, les libéralités au profit des établissements publics exonérés d’impôt ne sont pas ici évoqués. Cet article complète notre série sur les incitations fiscales des particuliers à donner en France. Il s’adresse donc à la fois aux donateurs philanthropes et aux organismes qui bénéficient de leur générosité.
Ce dossier traite des réductions d’impôt sur le revenu et sur la fortune immobilière, des droits de mutation des legs et donations, et du mécénat d’entreprises. Sont aussi abordées les notions d’organisme d’intérêt général et reconnus d’utilité publique et les procédures de rescrits à la disposition des associations et fondations.
Les droits de mutation des legs et donations
Les particuliers peuvent donner ou léguer une partie des biens qui leurs appartiennent. Ils ne peuvent cependant pas le faire à n’importe quelle condition. C’est en effet le Code civil qui régit le droit de la propriété. Plus précisément le titre II (Des libéralités) du Livre III (Des différentes manières dont on acquiert la propriété). Les libéralités sont des transferts de propriétés sans contreparties. Lorsque les libéralités sont conclues entre vifs on parle de donation. Quand elles ont lieu par testament au décès du donateur, on parle de legs.
La réserve héréditaire et la quotité disponible
Les particuliers ne peuvent pas transmettre une part importante de leur patrimoine s’ils ont des héritiers réservataires. En France en effet, il est interdit de léser ses héritiers. Les héritiers réservataires sont les descendants, c’est-à-dire les enfants et leurs propres descendants, et le conjoint survivant. La réserve héréditaire est la part d’héritage qui revient de droit aux héritiers réservataires. Dans l’hypothèse où les particuliers n’ont pas d’héritiers réservataires, alors ils peuvent tester l’entièreté de leur patrimoine à la personne (morale ou non) de leur choix. En revanche, dans le cas où ils ont des héritiers réservataires, seule la quotité disponible peut faire l’objet du legs.
Les droits de mutation à titre gratuit : l'enregistrement des libéralités
Les transferts de propriétés sont soumis à un impôt appelé droits de mutation ou droits d’enregistrement. Dans le cadre des libéralités, on parle donc de droits de mutation à titre gratuit. Ce qui ne veut pas dire que l’enregistrement des legs et donations est exonérée d’impôt. Dans le cadre de la famille, par exemple, la détermination du montant des droits de mutation à titre gratuit se base sur la qualité du donataire par rapport au donateur, ou de l’héritier par rapport au testateur. Ainsi, le montant de la libéralité exonérée de droits de mutations baisse avec l’éloignement de parenté du donataire au donateur ou de l’héritier au testateur. La totale exonération d’impôt des legs et donations, ou exonération des droits de mutation à titre gratuit, est un avantage rarement consenti par le fisc.
Les libéralités au profit des associations et fondations
L’article 910 du Code Civil prévoit la possibilité pour les particuliers d’accorder des libéralités à certains organismes, publics et privés. Nous ne traitons ici cependant que des personnes morales privées : les associations et fondations répondant à des caractéristiques bien précises. En effet, malgré les lois, ordonnances, décrets et circulaires destinés à simplifier le droit des libéralités, l’imposition des droits de mutation à titre gratuit reste un canevas complexe.
Dans tous les cas, les donations font l’objet, sous peine de nullité, d’un acte authentique devant notaire. Les legs font eux l’objet d’un acte authentique ou d’un testament olographe. En outre, la loi exige la déclaration des donations et legs au Préfet du département. C’est l’organisme bénéficiaire qui déclare les donations, et le notaire qui déclare les legs.
Les associations autorisées à recevoir legs et donations imposés à 60%
Le cas général ouvre le droit aux associations d’intérêt général de recevoir legs et donations. Celles-ci doivent néanmoins revêtir les caractéristiques qui les autorisent à émettre des reçus fiscaux, c’est-à-dire appartenir aux mentions prévues aux 1) b) de l’article 200 et au 1) a) de l’article 238 bis du code des impôts. En outre, elles doivent être déclarées depuis au moins trois ans.
Le législateur, pour ne pas créer d’effet rétroactif à la Loi de 2014 sur l’ESS, inclut aussi certaines associations déclarées avant le 31 juillet 2014. Celles-ci doivent cependant déjà avoir accepté avant cette date une donation ou un legs. Et elles doivent avoir pour but exclusif l’assistance, la bienfaisance ou la recherche scientifique ou médicale. Certaines associations de droit local en Alsace-Moselle et les unions agréées d’associations familiales ont aussi la capacité de recevoir legs et donations.
Si le droit des successions autorise ces associations à percevoir legs et donations, ces dernières doivent néanmoins bien réfléchir avant de les accepter. En effet, les droits de mutation à titre gratuit s’élèvent à 60% du montant de la donation ou du legs. Avec un tel taux d’imposition, le legs d’un bien immobilier, par exemple, engendre pour en disposer des frais importants pour l’association qui le reçoit. La vente du bien s’impose le plus souvent pour l’association bénéficiaire.
Les legs et donations aux associations et fondations reconnues d'utilité publiques
Les associations reconnues d’utilité publiques et fondations reconnues d’utilité publiques disposent de la grande capacité juridique. Elles disposent du droit de recevoir les legs et les donations de ce fait. Les droits de succession qui s’appliquent à elles sont les droits de mutation à titre gratuit prévus entre frères et sœurs. Le taux d’imposition est donc moindre que dans le cas général. Il est de 35 % pour une donation ou un legs dont le montant s’élève jusqu’à 24 430 €. Au delà de ce montant, le taux d’imposition passe à 45%.
Les organismes exonérés des droits de mutation sur les legs et donations
Le législateur prévoit que certains organismes bénéficient de l’exonération d’impôt sur les legs et donations. Il traduit donc par là une volonté politique de canaliser la générosité des philanthropes vers ces organismes. L’Article 795 du Code des impôts décrit cette exonération des droits de mutation à titre gratuit. Voici la liste des organismes autorisés :
- Les associations reconnues d’utilité publique (cf supra) dont les ressources sont affectées à des œuvres d’assistance, à la défense de l’environnement naturel ou à la protection des animaux.
- Les fonds de dotation ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel, ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises.
- Les fonds de dotation dont la gestion est désintéressée et qui reversent les revenus tirés des dons à d’autres organismes à but non lucratif.
- Les associations cultuelles et congrégations.
- Les établissements publics ou d’utilité publique, dont les ressources sont exclusivement affectées à des œuvres scientifiques, culturelles ou artistiques à caractère désintéressé.
- Les fondations universitaires, les fondations partenariales et les établissements d’enseignement supérieur reconnus d’utilité publique.
Pour aller plus loin
Les associations et fondations qui s’interrogent sur leur capacité à accepter legs et donations peuvent demander un rescrit administratif.
Les politiques publiques en France sont incitatives pour qui veut participer au financement de l’intérêt général. L’exonération d’impôt sur les legs et les donations n’est en effet pas le seul dispositif. Les philanthropes et les organismes récipiendaires de leur générosité seront ainsi également intéressés par les articles suivants.
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